16 avr. 20224 Min

Faiseur de dieux, Markus Lüpertz à Orléans

Mis à jour : 5 juil. 2023

Par Nicolas Bousser

Ein Krieger. Chapeau noir, pardessus beige, chaussures impeccables et canne au pommeau argent à la limite du clinquant, Markus Lüpertz nous accueille à Orléans ce jour ensoleillé de mars. Un combattant oui, mais un combattant de l’art. Un an après le succès de sa mise en scène de La Bohème de Puccini au Meininger Staatstheater, l’artiste allemand âgé de 81 ans déploie son œuvre jusqu’au 4 septembre entre le musée des beaux-arts, le centre-ville et le parc Pasteur de la cité loirétaine. Chaque année, le musée invite en effet un artiste contemporain avec un souhait de faire entrer son œuvre en résonance avec le musée précise Olivia Voisin, la directrice.

Fig : Markus Lüpertz dans les salles du musée des Beaux-Arts d'Orléans. Photographie : Nicolas Bousser

Partagés entre les salles du musées et les rues orléanaises, ce sont 120 peintures, dessins, sculptures et sculptures monumentales de Lüpertz qui s’exposent, permettant d’appréhender le processus créatif de ce représentant du néo-expressionnisme allemand au même titre que Baselitz et Immendorff. L'exposition, nommée « Faiseur de dieux », se veut une réflexion en commun avec l'artiste sur les notions de héros et d'idéal, de figuration et d'abstraction.

Fig : L'exposition dans les salles du musée. Photographie : Nicolas Bousser

L’antique

Un sujet qui fait sens puisque l’artiste revisite de manière récurrente dans son œuvre différentes légendes et mythologies, antiques notamment, tout en cassant leur classicisme. Il mélange les temps et les espaces et fait se confronter héros, statues et dieux à une nature morcelée, notamment dans la série les Arcadies réalisée entre 2013 et 2015, qui constitue la clé de voûte de la présentation au sein du musée. Le peintre se définit d’ailleurs comme une « un braconneur dans l’Antiquité de par ses sujets ». Il poursuit en expliquant qu’il cherche à détruire le perfectionnisme des grecs dans son attitude créatrice. Lorsqu’il créé à partir de 1962 ses peintures dites dithyrambiques, Lüpertz se réfère déjà à l’antiquité, en pleine vague pop et conceptuelle, - dithyrambe, cet hymne chanté et danse à l’origine sous l’emprise de Dionysos. Il publie dans la foulée, en 1966, L’art qui se tient dans le chemin, manifeste dythyrambique. Le musée propose d’ailleurs à la vente un recueil rassemblant les textes et manifestes de Markus Lüpertz, un bon point. Comptez néanmoins 34 euros pour acquérir l’ouvrage.

La sculpture du peintre

« Il y a une grande différence entre les sculptures de peintres et les sculptures de sculpteurs. En ce moment, ce sont les peintres qui sauvent la sculpture ». À partir de 1981, Lüpertz complète sa pratique en s’essayant à la sculpture : elle ne le quittera plus. La découverte de l’art de Maillol un an auparavant y est pour beaucoup. Ses œuvres sculptées, de son propre aveu, sont systématiquement en lien avec ses peintures. Malgré son âge et une jambe qui le fait souffrir depuis un accident, l’artiste grimpe encore au sommet d’échelles pour achever ses monumentales sculptures pouvant atteindre un dizaine de mètres. Lors du placement de celles choisies pour Orléans, l’artiste a opté pour un alignement implicite de ses œuvres dans une optique précise : celles-ci convergent vers la cathédrale. « L’artiste a compris l’importance du monument » précise Olivia Voisin. Notons la présence de QR code apposés sur les socles, permettant de suivre le parcours conçu dans les artères orléanaises et d’en apprendre plus sur le travail de l’artiste allemand.

Fig : Markus Lüpertz contemplant l'une de ses œuvres installée dans le Parc Pasteur. Photographie : Nicolas Bousser

Fig : Les sculptures de Lüpertz dans les rues d'Orléans. Photographies : Nicolas Bousser

« Sous le regard surpris des passants, des géants se sont installés à Orléans ». Nous terminerons avec cette citation. Lüpertz fait de la cité son terrain de jeu. Une grande soirée sera organisée le 18 juin en présence de l’artiste, qui suivra une masterclass donnée aux étudiants de l'Ecole supérieure d'art et de design de la villle.

Durant cette soirée, Lüpertz donnera un concert avec son groupe de free jazz Triple Trip Touch. Car oui, l’artiste est également pianiste ! Avant cette date, qui verra l’édition d’un catalogue de l’exposition, une large programmation culturelle sera mise en place : lectures de poèmes de Markus, visites guidées dans la ville, ateliers et stages d’art plastique. Autant d'éléments qui justifient un détour par Orléans. N'oubliez cependant pas, lors de votre venue au musée, de rentre visite à Jean-Baptiste Perronneau, Jean Bardin ou encore Guido Reni dans les salles des collections permanentes : ils vous y attendent de pied ferme.

Fig : Lüpertz, la main de l'artiste. Photographie : Nicolas Bousser


Musée des Beaux-Arts d'Orléans

1, rue Fernand Rabier
 
45000 Orléans
 
France

Gratuit le 1er dimanche du mois
 
Plein tarif : 6 €
 
Tarif réduit : 3 €
 
Billet groupé valable une journée donnant droit à l’entrée du Musée des Beaux-Arts, du MOBE (muséum d’Orléans pour la Biodiversité et l’Environnement), de l’Hôtel Cabu (musée d’Histoire et d’Archéologie d’Orléans) et de la Maison de Jeanne d’Arc.