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Une promenade dans le hameau de la Reine


Le Château de Versailles, symbole de l’Ancien Régime voulu par Louis XIV, est aujourd’hui l’un des monuments les plus visités du pays. Son jardin, dans sa Grande Perspective conçue par Le Nôtre, renferme maints trésors, allant des nombreux bosquets cachés dans les allées labyrinthiques, au Grand et au Petit Trianon, refuges intimes des rois et des favorites. Par delà les grilles de ce qui est aujourd’hui appelé le domaine de Marie-Antoinette, se cache un coin de paradis, comme figé hors du temps, que nous allons parcourir : le hameau de la Reine.

©Coupe-file

Marie-Antoinette en paysanne, 1791, d'après un dessin de Césarine Franck

Marie-Antoinette d’Autriche arrive à Versailles en 1770, afin d’épouser le dauphin, futur Louis XVI. Même si elle apparait comme l’archétype de la reine de France adepte des fastes et du plaisir, c’est en réalité une femme que l’étiquette rigide de la cour rebute dès son arrivée. A partir de 1774 déjà, elle trouve refuge au Petit Trianon, pavillon construit sous Louis XV, éloigné du grand château. En 1777, elle y commande un jardin anglais. Cinq ans plus tard, influencée par les écrits de Rousseau prônant un retour à la nature, et par sa volonté de s’éloigner des contraintes que la vie royale impose, elle demande à l’architecte Richard Mique de lui construire un petit monde artificiel inspiré de la vie rurale. Les travaux sont achevés trois ans plus tard. Commence alors une double vie pour la reine, l’une entre les couloirs prestigieux du Château, et l’autre dans ce village préfabriqué où elle se plait à jouer à la paysanne avec ses intimes et ses enfants. Abandonné suite à la Révolution, menacé de destruction, remanié pour l'impératrice Marie-Louise puis oublié, le hameau est finalement réhabilité à l'aube du XXe siècle. Il est inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1979, et ouvert au public depuis 2006.


Vue aérienne du hameau de la Reine, ©Château de Versailles

Passons donc derrière le Petit Trianon et déambulons sur les petits chemins hasardeux, dans les pas de Marie-Antoinette. Levons la tête et admirons d’abord les grands arbres qui s’épanouissent de tous les côtés, vêtus de leurs couleurs d'automne. Nous arrivons rapidement sur les berges d'un lac, autour duquel rayonnent de petites maisons aux toits de chaumes et aux charpentes de bois. Penchez-vous vers l'eau ; vous y verrez des carpes et des brochets, car c'était là un endroit dédié à la pêche.

©Coupe-File

Pour ce faire, il était d'usage d'utiliser les embarcations stockées dans la tour de Malborough. Anciennement appelé "tour de la pêcherie", c'est ce petit phare à l'escalier de bois qui surplombe l'étendue d'eau. Extrêmement endommagé lors de la Révolution, il est restauré sous  Napoléon 1er, qui lui donne un aspect plus simple. L'escalier, quant à lui, est reconstruit identiquement à l'original en 2002. Y monter permettait de s'offrir une vue fabuleuse sur l'ensemble du site, dans un calme total.



Dirigeons nous maintenant vers ces étonnantes petites maisons rurales. En contournant le lac vers la droite, nous arrivons d'abord au boudoir et au moulin. Le nom du premier indique bien sa fonction, mais ne vous fiez pas à celui du deuxième, dont la roue n'est en fait qu'un élément de décoration !


Le salon de la Maison de la Reine ©Thomas Garnier/château de Versailles

Par-delà ces deux bâtiments se dresse celui qui est sans doute le plus important de l'ensemble : la Maison de la Reine, composée de deux parties reliées par une charmante passerelle. En restauration de 2013 à 2018, vous pouvez désormais visiter son intérieur. Alors, l'on se plonge dans le lieu où la souveraine passait le plus clair de son temps, recevant ses dames de compagnie dans la salle à manger, ou jouant du clavecin dans le petit salon, tout en surveillant par les fenêtres ce qui se passait dans les petits champs qui se cachent derrière les bâtisses, qui sont d'ailleurs toujours en activité ! Jetez un œil, ou passez derrière, par dessous la passerelle, vous verrez. Cette véritable habitation secondaire, où Richard Mique lui-même vécut un temps, est retrouvée dans un très mauvais état après la Révolution. Comme la tour de Malborough, elle est restaurée en 1810 et remeublée dans un style Premier Empire pour l'Impératrice Marie-Louise, style dans lequel elle est encore visible aujourd'hui.


Ensuite, passons un petit pont fantaisiste, et voyons se succéder une volée de maisons à la fonction bien définie : le colombier, la maison du garde, l'ancienne grange, l'ancienne laiterie de préparation dont il ne reste que des ruines, et la laiterie de propreté. Nous sommes alors juste derrière la tour de Malborough, et pouvons profiter de la vue telle qu'elle apparait sur la photo principale de cet article. A ce stade, nous ne nous croirions même plus dans les jardins à la nature si contrôlée du château principal, mais dans un véritable village de campagne du XVIIIe siècle.

©Coupe-File

Cependant, notre visite n'est pas terminée ! Afin d'atteindre le dernier bâtiment, à ne surtout pas rater, il faut s'éloigner un peu du hameau principal et passer à travers petites prairies et champs. C'est alors que l'on commence à entendre le caquètement de poules et le bêlement de chèvres, le grognement de cochons et le braiment d'ânes. Se profile alors un véritable ensemble autonome, animé d'enclos, de granges, d'étables, ou encore de poulaillers : la ferme. Conçue pour être fonctionnelle dès la construction du hameau, sur le modèle des fermes suisses, elle permettait notamment d'alimenter le château en œufs et en lait. Même si l'on est loin de l'aspect purement décoratif du moulin, n'oublions pas que l'on était toujours dans un complexe d'agrément royal ; en 1787, une salle de bal y est construite pour le bon plaisir de la reine, qui n'hésite d'ailleurs pas à s'impliquer avec le fermier, Valy Bussard, dans le choix des animaux à exploiter. Contrairement aux bâtiments vus précédemment, le Premier Empire ne voit pas la nécessité de restaurer celui-ci, qui tombe en ruine après un incendie, et qui est par la suite oublié des grandes campagnes de restauration. Il faut attendre 1992 pour que l'on décide de reconstruire l'édifice dans son état d'origine, chantier qui durera quatorze ans. Aujourd'hui devenue ferme pédagogique, elle est gérée par l'association Assistance aux Animaux, qui propose aux enfants de venir découvrir le monde rural.


La promenade terminée, aventurez-vous sur les sentiers qui vous mèneront sur le chemin de retour jusqu'au Petit Trianon, gardant avec vous le souvenir d'un monde artificiel à la volonté d'authenticité, d'un microcosme sur lequel le temps n'a pas de portée. Véritable plongée au cœur d'une époque révolue, le hameau de la Reine est le symbole même de la personnalité de Marie-Antoinette, et porte encore aujourd'hui cette magie qui devait déjà s'en échapper à la fin du XVIIIe siècle.


Raphaëlle Agimont

 

Pour une visite virtuelle du hameau, comme si vous y étiez : http://www.chateauversailles.fr/grands-formats/hameau-de-la-reine#la-maison-de-la-reine-et-le-rechauffoir


Pour une visite réelle :

Prix du billet domaine de Trianon : 12 euros

Prix du passeport Château + domaine de Trianon : 20 euros


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