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Claude, un empereur au destin singulier


Statue de Claude dans la nudité héroïque, vers 40, marbre. Paris, musée du Louvre.

Le Musée des Beaux-Arts de Lyon accueille depuis le 1er décembre dernier et jusqu'au 4 mars une exposition temporaire consacrée à l'empereur romain Claude. L'occasion pour le passionné comme le néophyte d'en apprendre plus au sujet de ce personnage méconnu et moqué par l'Histoire.

Après l'Egypte en 2000 et la Grèce en 2004, la directrice du département des Antiquités et commissaire de l'exposition Geneviève Galliano avait a cœur de mettre en valeur le dernier pan des collections anciennes resté dans l'ombre : l'empire Romain. En 2013, désireuse d'organiser une exposition sur le sujet, madame Galliano est en visite au musée Lugdunum – anciennement musée gallo-romain – avec son directeur monsieur Hughes Savay-Guerraz. " L'idée de Claude nous est venue alors que nous discutions devant des camées gravés à son effigie et s'est immédiatement imposée " révèle la commissaire. L'exposition Claude est donc organisée dès le départ en collaboration avec le musée Lugdunum. Celui-ci accueille ainsi en résonance une exposition photographique intitulée L'esprit des ruines, photographies de Ferrante Ferranti aux mêmes dates. Pour madame Galliano, le travail de Ferrante Ferranti " apporte une âme " à l'exposition Claude. " C'était une volonté personnelle d'associer le regard de la photographie contemporaine à une exposition d'antiquités ".

Avis aux curieux qui souhaitent la découvrir au musée Lugdunum, cette exposition vient en effet renforcer l'aspect très humain de Claude mis en avant par la présentation du musée des Beaux-Arts.

Tiberius Claudius Drusus naît à Lugdunum en 10 avant notre ère, alors que la ville est une colonie romaine. Le parcours muséographique nous fait ainsi découvrir la trajectoire étonnante de cet homme qui n'était pas destiné à régner. En 41, Claude succède pourtant à son neveu Caligula victime d'une conspiration, en supplantant ses concurrents grâce à l'appui de la garde prétorienne. Premier empereur né en dehors d'Italie, il étend les possessions romaines grâce à la conquête des îles Britanniques en 43 qui lui confère le titre de Britannicus. Par ailleurs sur le plan intérieur il est à l'initiative de la construction du port d'Ostie à partir de 42, alors le plus grand du monde romain. L'avènement de Claude assoit définitivement la légitimité de la dynastie des julio-claudiens. Il participe ainsi activement à l'entretien du souvenir des membres de sa famille vivants et disparus à travers une propagande reposant notamment sur la diffusion de monnaies à leur effigie. La capitale des Gaules accueille alors le seul atelier de frappe de l'Empire en dehors de Rome. L'attachement de Claude pour sa ville natale trouve son apogée dans le discours qu'il prononce en 48 devant le Sénat romain pour demander l'accès à ce dernier aux notables Gaulois, qui sera obtenu. Claude meurt en 54 dans des circonstances obscures, probablement empoisonné par sa quatrième épouse Agrippine, après treize années d'un règne bref mais intense.

Claude, un empereur au destin singulier propose donc de retracer son histoire à travers douze thématiques : L'Empire des Julio-Claudiens, La naissance à Lyon, Germanicus, le frère, Caligula, le neveu, Claude, de l'ombre à la lumière, Un avènement inattendu, L'Empire, La légitimité dynastique, Le gouvernement, La Table claudienne, Les marques du pouvoir et enfin La fin d'un empereur, la naissance d'un dieu. " Dès son entrée dans la première salle, le visiteur est invité à dépasser ses préjugés sur le personnage en franchissant les trois arcades qui les symbolisent " nous confie Geneviève Galliano, commissaire de l'exposition. Des extraits de films montrent au visiteur un Claude faible et handicapé par son physique, clichés bien vite dépassés par l'exposition. Celui-ci est invité à connaître de mieux en mieux cette figure complexe, accompagné par la scénographie qui joue un rôle majeur dans cet apprentissage. " Les couleurs se densifient au fil de l'exposition, du rose inaugural jusqu'au rouge vif " affirme madame Galliano qui loue la proposition des scénographes Jean-Paul Camargo et Xavier Bonillo, " élégante et monumentale, qui n'écrase toutefois jamais le visiteur. "



Table Claudienne, après 48, bronze. Lyon, musée Lugdunum.


L'exposition rassemble pas moins de 170 pièces liées à la figure de l'empereur et à sa ville natale provenant de l'Europe entière. Si nombre d'entre elles proviennent des propres collections du musée des Beaux-Arts, le musée Lugdunum, celui du Louvre, ainsi que des musées allemands et italiens ont également accepté de prêter leurs œuvres. Madame Galliano nous indique s'être beaucoup déplacée " en personne afin de rencontrer les directeurs de musée, ce qui aide énormément " à l'accord de prêts. Mention spéciale aux équipes du Louvre, " qui nous ont très bien accueillis et nous ont fait profiter de leur expérience de l'exposition Auguste organisée en 2014 au Grand Palais ". Le musée Lugdunum a également apporté son soutien grâce à l'appui de son directeur monsieur Savay-Guerraz, co-commissaire de l'exposition Claude.


Relief historique dit relief des Prétoriens, vers 51-52, marbre. Paris, musée du Louvre.

Concernant l'aspect historique de l'exposition, madame Galliano a fait appel à monsieur François Chausson, nommé directeur du catalogue et qui intervient ici en tant qu'historien spécialiste et épigraphiste. Elle-même généraliste de l'Antiquité, madame Galliano avoue qu' " il y avait un réel désir d'associer une partie scientifique à l'exposition.". Les propositions de monsieur Chausson ont nourri la réflexion de la commissaire dans sa construction du parcours muséographique.


En outre, l'exposition a été reconnue d'intérêt national par le ministère de la culture, débloquant ainsi des fonds pour sa réalisation. Cependant la meilleure " reconnaissance du travail fait et de la qualité du projet " réside pour madame Galliano dans le transfert de l'exposition à Rome au musée de l'Ara Pacis à partir d'avril 2019. Une demande qui émane directement du musée italien et vient corroborer la bonne fréquentation de l'exposition " même si celle-ci a diminué lors des courses de Noël et des manifestations des gilets jaunes ".


En définitive, Coupe-file ne peut que vous recommander cette superbe exposition réalisée à la pointe des dernières découvertes archéologiques et historiques. Claude, un empereur au destin singulier, vous invite à sauter dans le passé à la rencontre du plus impérial des Lyonnais.


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Du 1er décembre 2018 au 4 mars 2019

Musée des Beaux-Arts de Lyon

Horaires : de 10h à 18h, sauf le mardi. Visites commentées les lundis à 12h15 et les jeudis à 16h. Nocturne le vendredi 1er février. Tarifs d'entrée au musée : 12 € pour les adultes, 7 € pour les personnes de 18-25 ans, gratuit pour les mineurs.


Antoine Bouchet


Coupe-file tient à remercier Madame Galliano pour avoir bien aimablement accepté de répondre à nos questions.

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